
Les élèves de 5SC3 vous présentent leurs créations littéraires inspirées par les musiques et bruits du monde. Leurs textes vous emmèneront dans une ville qui ne connaît pas le bruit, dans les paroles d’un célèbre groupe de rap, dans un monde hypnotisé par une chanson à la mode et dans bien d’autres univers auditifs.
L’art musical de la nature
DRIING!
L’alarme sonna à 7h30 du matin, ma maman me réveilla, 22 mars 2016, j’avais 11 ans cette année-là, je me levais avec difficulté, je tirais les rideaux, j’aperçus quelques rayons de soleil qui illuminaient la chambre dans laquelle je me trouvais.
7h35
Je me pressai d’aller sous la douche avant de regarder mon dessin animé préféré, “Oui-oui”, qui passait tous les matins vers 7h40.
7h40
Une serviette sur la tête, je me posais devant la télé et je l’allumais, je faisais défiler les chaînes à toute vitesse, espérant voir mon dessin animé, mais non, ce jour-là, ils avaient préféré faire passer un débat télévisé sur les attentats qui s’était passés quelques heures plus tôt. Déçue, j’allais déjeuner, m’habiller pour sortir à 8 heures.
8h10
“IMANE DÉPÊCHE TOI, TU VAS ÊTRE EN RETARD.”
La voix de ma maman retentissait dans l’appartement.
8h15
Je sortis et j’allai attendre l’ascenseur, je descendis, j’ouvris la porte et je fus surprise par la brise d’air froid matinale qui frappa mon visage encore chaud et je ressentais les rayons du soleil qui transperçait ma peau, ce qui fit hérisser mes poils, puis je levais la tête, je fermais les yeux et j’entendis un son, une musique, une harmonie, pas une musique avec du tempo, des accords, ou un couplet, non, des oiseaux : le merle noir qui sifflait, la mésange qui titinait, les grives qui babillaient, les pinsons qui fringotaient, tous chantaient en harmonie, c’était harmonieux. Ils ne faisaient pas d’erreurs dans leur création musicale. Tous ces oiseaux étaient sûrement des mâles qui ont en général le chant le plus complexe pour marquer leur territoire ou séduire les femelles. Certaines espèces pouvaient chanter en duo, n’est-ce pas magnifique?
Les cris des grues me firent ouvrir mes yeux, toujours le nez en l’air, je comptais 70 grues formant dans le ciel une pointe en V indiquant sûrement le Nord, quel spectacle magnifique!
Pendant quinze minutes, je fus déconnectée de ce monde, profitant seulement de la musique que la nature nous offrait. Je ne saurais vous décrire ce sentiment, mais si je devais mettre des mots sur ce que je ressentais sur le moment ; je vous dirais peut-être que j’étais apaisée et heureuse, mais pourquoi me direz-vous? Après tout, j’ai quand même allumé la télé sur un débat qui parlait des attentats alors que j’attendais “Oui-oui”, j’aurais dû être frustrée ou bien déçue. Si cela s’était passé il y a quelques mois de cela, en plein hiver, où je finis par confondre le jour et la nuit, où la paresse de me lever me touche tous les matins, où le monde est grincheux et nostalgique du dernier été, j’aurais été probablement contrariée du fait que j’avais raté mon cartoon. Mais ce jour-là, rien ne pouvait me toucher, ni le fait d’avoir loupé mon dessin animé, ni le fait d’être en retard, ce que je voulais, c’était juste entendre des oiseaux chanter. Après cela, plus rien ne pouvait m’attrister.
Ils avaient l’air tellement libres, ces oiseaux ! Cette pensée me traversa l’esprit durant mon trajet : oui, ils étaient libres, ils avaient l’air heureux, sans soucis. Après tout, lorsqu’ils ont froid, les cigognes, les bernaches à cou roux et les étourneaux sansonnets migrent vers des pays chauds …et le milan noir et plein d’autres espèces migrent lorsqu’il fait chaud. Le rouge gorge est un exemple typique d’oiseau au comportement migratoire variable. Le fait qu’un tel oiseau migre vers le Sud ou non dépend d’une combinaison de circonstances, n’est-ce pas la belle vie ?
Etant petite, j’avais soif de cette liberté, j’avais l’impression de toujours suivre cette routine école-maison, je ne m’en plaignais pas : dans certains pays d’Afrique centrale, certains élèves rêveraient d’être à ma place, mais eux avaient aussi la chance d’écouter ce chant d’oiseau et de lever la tête vers le ciel pour observer ceux-ci, peut-être même que pouvaient-ils écouter ce son continuellement, ils n’avaient pas de routine particulière à respecter, pensais-je.
J’aurais donné énormément pour pouvoir écouter les oiseaux chanter sans arrêt, je savais que cela m’était impossible, je devrais plutôt me contenter du bruit des gouttes de pluie qui font la course sur ma fenêtre, mais les gouttes, je les connaissais par coeur, moi je voulais des oiseaux, juste des oiseaux, je voudrais me lever tôt tous les jours, qu’il fasse beau, tous les jours, entendre ce chant tous les jours, voler avec les oiseaux, exprimer cette soif de liberté que je gardais en moi, parler leur langage, me sentir heureuse, sentir cette brise indéfiniment, sentir ce soleil éternellement, je voulais que ce 22 mars 2016 se reproduise sans limite, je voulais que ce mercredi soit le mercredi de tous les jours.
Je voudrais que ce chant, et que ces ondes sonores fassent vibrer le tympan de mon oreille qui enverrait un message à mon cerveau en lui disant qu’après ce son, la journée ne pouvait que bien commencer, je voudrais ce signal tous les jours.
“BIP, BIIIIIIIIIIP”
Ce concert d’oiseau s’arrête, le silence revient laissant place aux bruits des klaxons qui irritaient mes oreilles et à la forte odeur de carburant qui gênait mon nez, … peu importe ; j’avais entendu ce chant, je marchais vers la station de métro afin de partir en cours.
“Bzzz, Bzzzzz”
Mon téléphone vibra, message de maman. “Imane rentre à la maison, l’école a fermé ses portes c’est dangereux dehors,…” Peu importe j’avais entendu ce chant, la journée ne pouvait que bien se dérouler….croyais-je…
I. G. , 5SC3